HEDONISME: Système moral qui fait du plaisir le principe ou le but de la vie

mercredi 28 décembre 2011

La minute gastronomique de Maurice PINQUE- FLOYD

La recette culinaire du bonheur, selon mon grand ami Maurice PINQUE- FLOYD (mort au combat qu'il livra contre une horde de moustiques brésiliens un soir de Septembre 2003 derrière les tamaris de la Chourascaia - paix à son âme):

Le Quatre Quarts Camarguais;

- Un petit quart de sable entre les orteils.
- Un quart de gros sel de mer au coin des lèvres.
- Un bon gros quart de vent dans les cheveux.
- Un quart conséquent de soleil sur la peau.


- Rajoutez une grosse pincée de belles vagues bien rondes, et servez en abondance à tous vos amis. Vous pourrez également y inserer, en guise de fève, une magnifique telline "AOC de Beauduc", millésime "Brafougne du Siècle"... Bon appétit à tous.

Liens utiles
la Chourascaia:
http://www.webcity.fr/la-churascaia-nimes/lieu
http://fr.tilllate.com/fr/location/la-churascaia
http://www.youtube.com/watch?v=ujJYKPd61AY&feature=related








dimanche 25 décembre 2011

Speed Session: Coups de cutters dans les eaux du Pegoulier


          Samedi 24 Decembre 2011. Prévisions météo en camargue: 35/45nds en rafales sur le delta du Rhône. Il en fallait pas plus pour que, dès la veille, on s'appelle les uns les autres...
"Ouais, Greg (BENETEAU), c'est Momo: Qu'es' tu fout demain?
- C'est bon, chuis libre.
- Et si on allait au Pégoulier pour faire chauffer les cuisses et les GPS?
- Allez, ça roule, ma poule. Je crois qu'Alex (CAIZERGUES), Philippe (son père), et Tof (Chris HARDUIN) seront de la partie. "
Samedi matin, 11h00, j'arrive à Carteau. Greg est déjà là, à l'abri du vent, profitant du soleil. On fait peter le thé chaud avec les galettes bretonnes, en attendant les autres. Tof arrive. Il a prétexté auprès de sa femme qu'il allait acheter des fruits de mer pour esperer pouvoir se casser 2 ou 3 heures. Puis la Caizergues Family rapplique. On s'équipe, puis on gonfle les ailes (Greg en 6², Phil, Tof et moi en 7², Alex se chie pas et prépare la 8²). Greg est le premier à lever son aile. Impressionné par les rafales, il largue une première fois, redécolle, et largue à nouveau. Il décide de rester à terre. Tof, Alex, Philou et moi nous levons nos ailes, ajustons les réglages de puissance, et partons à l'eau. Chaud devant !!!

Le run du Pégoulier est 800 metres sous le vent. Cette descente au vent arriere va nous permettre de prendre prudemment la mesure du Mistral.
Arrivé sur place, chacun prend ses marques, enclenche son gps, et, à tour de rôle, fait son premier run de repérage, ce qui permet de jauger la très faible profondeur d'eau (moins de 10 cm parfois!!!), vérifier l'absence de piquets de pecheurs, bref chauffer les ailerons.
Mon premier run, courte acceleration, pic de vitesse, controle basique des sensations, et deccéleration, m'affiche un 41.5 nds. Je remonte, prends plus d'élan, puis j'envoie la purée. L'aile tracte fort, je la positionne assez basse dans le ciel pour avoir un bon appui anti dérive, prendre l'acceleration et abattre dans la réfraction du soleil, full speed..... Au bout d'une quinzaine de secondes, je choque ma barre et lève l'aile tout en chargeant le pied arrière afin de cranter pour remonter au lof..... 48.9 nds.
Je croise Alex, on s'échange nos sensations: Il est déjà à 52 nds, l'extra terrestre!
Les runs suivants vont saturer autour de 49nds. Puis vient le run à la sortie duquel je me mets la quiche du mois. Au bout de je sais pas trop combien de tours et de ricochets, je me retrouve le cul dans l'eau, entouré de mes lignes, et mon aile posée sur l'eau... à mon vent!!!. Rapidos, je me sors de mes lignes, car le danger est que l'aile redécolle avec moi dans les lignes. Pas Glop!! Puis je laisse dériver l'aile sous mon vent jusqu'à ce qu'elle reprenne une position apte au redécollage. Sitot l'aile en l'air, je constate que les lignes sont méchamment torsadées entre elles. Impossible de naviguer ainsi. Grace à un énorme pneu de camion planté là au vent du run, et sur lequel je parviens à accrocher mon chicken, je démêle mon plat de spaghettis, et j'en profite pour raccourcir mes arrières afin de gagner un peu de patate. 15 minutes plus tard, je suis à nouveau opérationnel.
Le run d'après sera le plus rapide. Parti dans une belle rafale, je me prends à mi course une acceleration venue de nulle part. La petite planche cabre un court instant, instinctivement, je choque un chouia, accentue mon crantage, et borde à nouveau. La sensation est magique. Là, ça déboule comme jamais. L'aileron arrière emet alors un petit sifflement très agréable à entendre. Je sors du run tant bien que mal. Je regarde mon Garmin.... 51.5 nds !!!! Pendant l'heure qui suivra, ce top speed ne sera plus remis en cause.

14h00. Retour à terre. Après avoir tout plié, on échange nos bests speeds: Philou à tapé autour de 49.5, Tof savoure son 48.38 nds. Je reste prudent avec mon 51.5, car mon GPS est assez genereux. Il me faudra attendre le dépouillement des données de mon autre GPS, un GT 31, pour constater qu'en fait mon véritable chrono a été de 49.860 nds. Je suis très content pour ma marque d'ailes. En effet, Takoon développe et commercialise des ailes qui sont faites pour un programme freeride / Freestyle, elles n'ont pas été taillées pour atteindre de très hautes vitesses. La 7m² Reflex s'en est très bien sortie. Je crois bien que jamais une Takoon n'a été menée aussi près de la barrière des 50 noeuds.
Alex, quant à lui, rentre à terre avec un incroyable 58 nds !!!! Mais comme je l'ai déjà dit en d'autres circontances: "Dur Alex Sed Alex"  !!!!!

Philou
Tof
Momo

Ce fut donc une belle journée, un joli Noël 2011. De la glisse pure et violente, des gadins, des images magiques, la Camargue dans toute sa spendeur brutale, comme je l'aime, entouré par certains de mes meilleurs amis.
Je vous souhaite à tous de découvrir des instants comme celui ci. Partager, tout le reste est superfétatoire.

De G à Dr: Momo, Philou, Tof & Alex......
Champagne en hommage à ....Greg.

Greg.
"Da fastest man...
... Back in his van!!!
 







mercredi 21 décembre 2011

CARRO la Belle...

CARRO la Belle...
Session du 5 decembre 2011

C'est toujours comme ça, là bas. T'arrives de bonne heure sur le parking du front de mer, les yeux inéluctablement rivés sur les vagues qui viennent finir leur course sur la dalle rocheuse en contrebas. Puis tu sors du VW, pour humer l'humeur du vent, et en déduire la surface de ton aile qui sera la plus appropriée. Le soleil de la Cote Bleue est bel et bien là, prêt à illuminer chaque gerbe que tu déclencheras.
Gonflage de l'aile sur les petits cailloux acérés, connexion des lignes, enfilage de la combi, sans oublier les chaussons salvateurs de gros "LE CON DE TA MEEEEEEERE!!!!" à l'encontre des épines d'oursins, et mise à l'eau prudente. Au bout de dix minutes, le feeling est pris, la session monte en puissance, les sens sont tous sur "on", je vais bien, merci. 


CARRO la Belle, la matinale, la lumineuse, nous offre alors des vagues d'un bleu Curaçao incroyable!! Cet endroit est magique, à condition de bien vouloir partager le spot avec les planchous, traceurs de sillages historiques du spot. Il est de bon ton d'y pratiquer le kite avec un surf strappé ou non, plutôt que d'utiliser le twin tip, vilain cabri arrogant et très mal vu ici bas. Le surf vous oblige à partager, et vous interdit toute "punk attitude" dans cette ambiance "Rocs and Rollers".

So, let's dance... I give you the choice for your next session's soundtrack.

http://www.youtube.com/watch?v=fl6s1x9j4QQ




 


jeudi 8 décembre 2011


Eloge de la vitesse     


                  


En cett’ morne période de vitesses limitées,

Sur des routes endormies ou tout l’ monde se prélasse,

Pernicieux p’tits radars ramasseurs de caillasse,

Demeure un beau terrain où l’Arsouille fait rêver.


Ce domaine ou persiste un vent de liberté

Ou des hommes et des femmes, avec une belle audace,

Affichent leur addiction pour le run qui décrasse,

Ce domaine, c’est la mer; Vous l’aviez deviné.


Peu importe si l’esquif pour lequel vous optez

Se nomme kite, gros bateau, fine planche ou barcasse

Dès lors que, plus que tout, vous haïssez la calmasse,

Alors là, moussaillons, un seul ordre : Au taquet !!!


Quoi de plus excitant qu’être au largue, bien bordé,

Tutoyer la limite, et prier pour qu’ça passe

Alors qu’il vaudrait mieux, pour pas que tu t’ramasses

Ecouter la petite voix qui te conjure de freiner !


Quoi de plus enivrant que de voir la risée

Faire ployer nos voilures, à deux doigts de la casse !

Sifflez dans nos haubans, embruns de première classe !!

On est là, tous marins, en néoprène ou grands cirés.




Aujourd’hui, c’est le kite qui est devant ses ainés

Et peut être que demain, d’autres engins crieront : « Place ! »

On s’en fout ! Pourvu qu’au grand jamais ne s’efface

Cet amour insatiable pour la houle dévalée !



 
Momo de Beauduc

mercredi 30 novembre 2011

St Tropez / Calvi en 5h20mn

SPEED CORS’ING
S t   T R O P E Z  -  C A L V I    E n    K i t e s u r f



Mardi 24 Juillet 2007 – 16h21 – Entrée du Port – Citadelle de Calvi :
Un homme est en train de monter à bord d’un petit bateau du club de voile local. Son matos, une aile de kite et une planche directionnelle, est hissé à bord par 4 jeunes insulaires venus l’accueillir. Il a les traits tirés, mais aussi un sourire qui en dit long sur le plaisir qu’il ressent à cet instant précis. Et pour cause : Plus tôt dans la matinée, peu après 11h00, escorté par deux autres kitesurfeurs et un bateau d’assistance, il quittait le petit port des Issambres dans le golfe de St TROPEZ, et fonçait vers le large, cap au 115°, pour une petite ballade de 106 miles nautiques (190 kms).


Lundi 23 Juillet 2007 – 21h00 - Dans une paillotte – Les Issambres :
 La soirée, d’une exceptionnelle douceur, ressemble à une veillée d’armes. Toute l’équipe est réunie autour d’une bonne table. Les 3 riders, Raphaël SALLES, Marc BLANC, et votre serviteur discutent avec Stépan EON, notre super intendant et spécialiste des traversées Continent-Corse, Franck …….,  le pilote de la sécu, et Hugo BADAROUX, le rédac chef de kitesurf mag. Il ne manque que Pierre LASNIER, notre ingénieur météo, et …………….. le photographe de Stance, qui arrivera dans la nuit. La traversée, prévue pour demain est omniprésente dans nos débats. Tout est passé en revue, ailes, planches, radios, camelbags, lunettes, combis, communications, attitude sur l’eau, vitesse de croisière mini, etc…. Les prévisions nous annoncent une météo « virile » : BMS en cours – vent d’ouest force 6 virant sud ouest 7 à 8 au large. C'est-à-dire 30/35 nds, avec rafales à 40nds ! En clair, on s’attend à recevoir un chouia. Le choix du matos sera déterminant. Pour les planches, on sait ce qu’il faut. Le seul outil capable d’avaler près de 200 bornes à plus de 20 nds de moyenne dans une mer formée, c’est une bonne planche directionnelle. Le Big Boss de F ONE travaille sur le sujet depuis près de 3 ans. Les bêtes qu’on a amenées font  2 m de long avec une largeur proche de 45cm. Assez lourdes et très rapides (35.7 nds sur le run de Leucate !!!) elles devraient nous permettre de mener à bien la mission (une production en petite série est d’ailleurs envisagée pour la fin de l’année).
Concernant les ailes, cette aventure va nous permettre de tester la petite dernière, fraichement sortie des bureaux de Montpellier. J’ai nommé la Bandit. On a décidé qu’on ne changerait pas de surface pendant la traversée, sauf en cas de casse. Cela nous impose donc, à cause de la raclée qu’on est censé se prendre au milieu de nulle part, de partir en petite taille.  Raph et Marco optent pour la 7.5² en 22 m de lignes. C’est une petite aile, avec un depower maximum, et qui possède néanmoins un bon fond de puissance. Quant à moi, avec mon quintal passé, je partirai en 9m² et 24m de lignes.
Le réveil demain matin est prévu à 07h00. On décide donc de ne pas s’éterniser, car notre pari s’annonce quoi qu’on dise assez risqué, et l’on sait tous que quelque sera le chrono réalisé, on va tous morfler notre race !!! Demain, on n’essaie pas le dernier jeu à la mode sur Playstation, mais on part pour quelque chose de grand,  avec une infime part d’incertitude, celle qui nous fait gamberger, et risque dans l’immédiat de nous empêcher de trouver rapidement l’indispensable sommeil bienfaiteur.


Mardi 24 Juillet 2007 – 09h30 – Port Rio – Les ISSAMBRES :

Après le bon ‘ti dej’, toute la troupe se retrouve dans un petit port ou nous attend Franck et son bateau. C’est un superbe semi rigide LOMAC de 9.50m, propulsé par 2 x 200 cv. L’engin et son patron inspirent confiance, ça tombe bien, en cas de lézard, c’est lui qui va nous empêcher de mourir, mangés par les vilains requins carnivores et autres mérous assoiffés du sang de prétentieux kiteurs néoprénisés que nous sommes !!! Argh !!!  je veux pas mourir dans le mouillé !!!! Maman !! Je te jure que si j’arrive en face sain et sauf, j’arrête de dire du mal de Thalassa !!!
On connecte les lignes sur chacune de nos ailes qui seront gonflées depuis le bateau, à 300m de la cote, car bien que ça commence à moutonner au large, il y a pétole au bord, à cause du relief varois. Chaque détail est vérifié : Remplissage des camelbags, contrôle des radios VHF, fusées de détresse…. Franck fait chauffer doucement les 2 x 200 CV pendant que le bateau finit d’être chargé. Enfin, nous montons tous les six à bord, et quittons le petit port, aussi discrètement que possible, car on n’est pas certains que le sémaphore du coin reste totalement indifférent à notre petite procédure de départ……


Zone de départ – 10h35 :

Nous y voici : Le vent rentre d’ouest, un peu rafaleux (15/20nds). Aucun nuage. A cette époque de l’année, le nombre de bateaux de plaisance est étonnamment faible. Le BMS en cours y est certainement pour quelque chose. Pendant que Raph regarde sa montre, Marco et moi nous mettons à zéro nos données GPS, et Franck appelle ………. , actuellement à bord de l’hélico qui devrait être sur nous dans 30 minutes. Petit moment de silence, on regarde Raph qui se demande si l’on doit attendre l’hélico, ou si on file de suite. En fait, notre tentative doit se faire dans une « fenêtre de vent » assez restreinte. On souhaite partir avant le gros coup, de manière à naviguer au devant du front, et bénéficier ainsi d’une mer pas trop destroyed.  Si l’on tarde, on risque de se faire rattraper par le coup de vent prévu aux alentours de 17h00. Et aucun de nous n’a envie d’encaisser des claques à 40 nds, voire plus ! De toute façon, on n’a pas pris nos peignes… Finalement, Raph nous dit : « Allez, on se met à l’eau, l’un après l’autre, ça prendra bien 15 minutes, et à 11h00, si on est prêt, on trace, l’hélico nous rattrapera au large ».
Puis il endosse son camelbag et se jette à l’eau en premier. Il déroule ses lignes en nageant à reculons pendant que son aile finit d’être gonflée à l’avant du LOMAC. Après un signe de la main, l’aile monte au zénith. Ensuite, il chausse sa directionnelle et dégage plein sud. Vient mon tour. Même scénario. Puis Marco fait de même et nous rejoint.


            Zone de départ – 11h00 :

Nous naviguons à présent autour du bateau. Je tire sur la pipette de mon Camelbag, car déjà j’ai la gorge sèche. J’ajuste la visière de ma casquette et mes lunettes de soleil. L’écran de mon GPS accroché à mon bras droit m’indique 4 données présélectionnées : L’heure, la vitesse max, la vitesse instantanée, et la distance parcourue. Mon aile toute noire tranche dans le ciel d’un bleu…ciel ! A la faveur de nos croisements, on se fait signe de la main pour confirmer que tout est OK.  Raph se rapproche une ultime fois du bateau pour faire le point sur l’approche de l’hélicoptère. Celui ci sera un peu en retard. Je suis sous le vent du bateau,  et Marco suit Raph à 40 m. Tout à coup, j’entends Raph qui me crie quelque chose. Je ne comprends rien, mais je crois savoir ce qu’il me dit. Je me retourne et je devine, à le voir partir au taquet dans mon dos, qu’il a décidé de lâcher les watts. Ca y est ! Je regarde mon GPS. Il est 11h04, et rapidement on se calle à une vitesse supérieure à 20 nds. L’angle du vent est assez abattu. Le cap nous sera donné par la direction dans laquelle ira le bateau. S’il reste à nos cotés, on est bon, s’il s’éloigne sur la gauche, il nous faudra abattre encore plus.



Raphael et Marco ouvrent le bal....Momo ferme la route
Un grand moment dans une vie de kitesurfeur.... à partager, impérativement.
.
Allez ! Pour le moment, il faut ne faut penser qu’à trois choses : Glisser propre, vite, et bien ! Le vent est là, pas fort, mais il est là. On glisse tous les trois en plein dans la réfraction du soleil. Bien content d’avoir pris des lunettes, moi ! La mer est plutôt tranquille, avec toutefois quelques marches qu’il faut aborder avec attention. Les GPS se calent autour des 20 nds. C’est un peu leger, car si l’on veut se farcir la traversée en moins de 5 heures comme prévu, en comptant les temps de relâche (remplissage des camelbags) et autres éventuels pépins, il nous marcher le plus souvent à 25 nds, pour engranger un peu de marge. Raph et Marco se suivent à 50m, je ferme la marche à 100m au vent et derrière eux. Je suis sous toilé, mais c’était prévu, du moins pour le départ. En attendant, il me faut bouger l’aile pour tenir la vitesse imposée par mes deux collègues.
Au bout de 15 minutes de nav’, j’entends derrière moi un bruit de rotor. C’est notre hélico qui nous a retrouvés. Aussitôt sur nous, il se met à la perpendiculaire de notre trajectoire et nous accompagne, porte latérale ouverte et caméraman en action. Superbe vision que celle de ce petit hélico qui vole en crabe dans les reflets du soleil avec les patins à moins de 2m des vagues, soulevant grâce au souffle de son rotor des paquets d’embruns argentés ! Notre gros insecte (qui pue l’essence aviation !!) nous accompagnera ainsi pendant plus de trente minutes, restant en permanence aux aguets, afin de proposer au caméraman le meilleur angle de vue sur la petite escadrille. Le bateau, avec Franck aux manettes, et Hugo et Stéphan en observateurs, nous suit sous le vent. Pour lui, les 20 nds de moyenne sont une simple formalité. En naviguant relativement loin sous notre vent, il nous fait comprendre qu’on est un poil trop à droite. Aucun de nous trois n’étant d’accord pour signer un « Continent – Sardaigne », on bascule sensiblement à gauche, mais cela devient franchement abattu, et le vent ne monte toujours pas. Du coup, il faut naviguer planche à plat mais l’aile ne porte pas assez, et pendant que la jambe avant encaisse toutes les aspérités du terrain, la jambe arrière supporte, non sans rouspéter, quasiment tout le poids du bonhomme. Je me dis que si le vent reste comme cela, il va falloir anticiper sur les futures crampes qui ne vont pas tarder. Je me rappelle de la ration d’eau minimum à engloutir : Deux grandes gorgées toutes les 15 minutes. Je ne me gêne pas pour augmenter la dose….
Au fil des minutes, je me fais lentement distancer par les deux « avions de chasse ». Ils s’éloignent de moi, car je suis comme pris en otage par un angle de navigation nécessairement moins lâché qu’eux, à cause de ma trop petite taille d’aile. Du coup, je suis trop à droite, et de surcroit, je me traîne. Un bref coup d’œil sur le GPS me confirme la vitesse que je ne sentais pas évoluer : 18/20 nds d’amplitude. Ce n’est pas assez. Et Raph, toujours en tête du cortège, ne va pas tarder à me le faire comprendre…
Les voyant ralentir, et se faire rattraper par le bateau, je décide de les rejoindre. Plein vent arrière, je change même d’amure, cap au nord-est. Arrivé à leur niveau, Raph me fait un peu la gueule, car je leur pourris la moyenne. On discute de mon problème, recharge les camelbags, et on repart de plus belle. A ce stade, je ne peux miser que sur une allonge du vent, ou une légère rotation au sud ouest, sinon rien ne pourra me faire aller aussi vite qu’eux.
            Comble de malchance, alors que je fais de mon mieux pour rester collé aux basques de Tom & Jerry, je sens tout à coup une infime vibration sous ma planche. Je me dis : « Non ! pas une algue dans les ailerons, pas ici à 35 miles de la cote ! Encore moins un sac en plastique !!! Pas ça !! » Je saute pour tenter de me séparer de ce p…… de gros c……. d’……. de sa race maudite de truc pourri, mais rien n’y fait. Je suis alors obligé de stopper pour retourner la board et arracher cette chose…. Hélas, j’aurais préféré que ce soit une algue ou un sac de chez Intermammouth. Un des trois ailerons s’est payé une belle plongée en apnée dans les abysses…en emportant avec lui tout le boitier !!! Un gros trou dans ma planche, qui fait écope et me freine comme si je naviguais avec la housse !!!!  Je sais dès cet instant que c’est très mal barré pour moi, car les planches de secours dans le bateau sont plus étroites encore que celle que j’avais. Donc pour la portance dans l’abattu, je repasserai… Je fais donc signe au bateau, qui me rejoint. Au moment où je leur indique que ma planche est morte, Stephan me dit que Raph souhaite accélérer. Je comprends aussitôt que je les ralentis considérablement. Aussi, sans hésiter, je présente mon aile à Hugo qui s’est mis à l’avant du bateau. Sitôt dans ses mains, il ouvre la valve et commence à plier l’aile.
Jamais je n’aurais pensé que le bruit si caractéristique de l’air qui sort d’un boudin, ce bruit que j’ai entendu plusieurs centaines de fois, ce bruit qui si souvent signait la fin d’une belle journée de navigation, ce bruit qui annonçait l’imminence d’une grosse partie de tchatche entre amis, agrémentée de deux ou trois « cervoises post-nav’ »,  jamais j’aurais imaginé qu’un jour, il puisse m’être à ce point désagréable …. Mon GPS, a ce moment là m’indique qu’on a fait 38 miles nautiques en 2h00, soit 19 nds de moyenne.


Jusqu’à l’arrivée : « Soixante neuf ……miles nautiiiiiiques !!! » 

Le temps de tout ranger et de me caler dans le bateau, Stone & Charden ont mis le Cruise Control sur « full power ». Les voilà à présent très loin du bateau, probablement à plus de trois miles nautiques. Dans cette immensité, les deux ailes paraissent minuscules à l’horizon. Pour les rattraper, Franck va faire chanter les deux V6, et le bateau file à présent à 33 nds. Nous mettrons plus de 15 minutes pour revenir à la hauteur de Bonnie and Clyde. C’est sur ce secteur qu’ils auront atteint les meilleures vitesses, avec un 28.8 nds sur le GPS de Raph. Marco signera pratiquement le même chrono.
A ce stade du parcours, Stéphan se dit que si le vent monte comme prévu, et surtout si les jambes de Laurel & Hardy tiennent le coup, le temps de référence établi voici deux ans par Manu BERTIN (06h39) va prendre un sacré coup de vieux ! Même le record absolu de traversée à la voile, détenu depuis 8 ans par feu Paul VATINE à bord de son maxi catamaran« Club Med », (05h04mn) a du souci à se faire !!!! Tout ceci, Raph l’a bien compris, et jusqu’à la fin, poussé par une exceptionnelle détermination, il va imposer à Marco un rythme plus que soutenu! Marco est lui aussi légèrement pénalisé par son rapport poids/puissance. Il a en effet la même aile que Raph (7.5m²) mais il y a un écart de 15 bons kilos en faveur du « Boss ». S’ils naviguaient vent de travers, cette différence serait quantité négligeable, mais à ce moment du parcours, ils font route à environ 150° du vent. A cause de ceci, Marco n’aura de cesse de bouger son aile pendant les 200 prochaines minutes !!!
            Malgré tout, David & Jonathan abattent les miles nautiques à une cadence très élevée. L’état de la mer n’évolue guère, et le vent oscille entre 22 et 25 nds. Le GPS du Lomac nous indique une vitesse similaire, et la boussole pointe le cap au 110°. De temps en temps, et à tour de rôle, Dupont et Dupont nous jettent sur le Lomac leur Camelbag vide. Hugo et moi remplissons chaque poche d’une mixture à haut pouvoir énergétique. Ensuite, nous les lançons à l’eau, devant les riders qui les récupèrent, et repartent illico. Ce à quoi nous assistons depuis le bateau sécu est extraordinaire : Chaque seconde perdue semble renforcer la motivation de nos deux lascars. Malgré la fatigue qui s’inscrit à présent sur leur visage, ils ont décidé, chacun avec ses propres arguments, qu’ils arriveront en Corse, et que la douleur grandissante aux cuisses et aux mollets ne pourra, ne devra en aucune manière contrarier cette aventure. S’il le fallait, Raph serait même capable de tracter le Lomac avec son aile, en cas d’avarie moteur ! J’ai rarement vu quelqu’un refuser à ce point toute notion d’échec. Ils iront au bout, point barre. C’est écrit quelque part.
            Au gré des miles qui tombent comme des mouches, l’écart entre Gault & Milhaud s’accentue. Pendant que le premier parvient à caler sa Bandit dans le ciel, le second est obligé d’envoyer son aile de haut en bas pour rester à une vitesse acceptable. Pendant près d’une heure, Marco va superposer son sillage à celui du bateau, ce qui a le double avantage de lui montrer le bon cap et de lisser quelque peu la surface de l’eau. A bord, on se partage les taches : Hugo et Stephan surveillent Raph, Franck gère le bateau, et moi, à l’arrière, je veille sur Marco. L’heure tourne. Il est un peu moins de 15h00 quand Hugo me tape sur l’épaule : « Regarde, momo, je crois qu’en face, sous les nuages, c’est la Corse ». Effectivement, on devine à peine les lignes de crêtes sombres qui émergent du halo nuageux.
A cet instant, je me suis senti comme projeté au 18eme siècle, à bord de ces galions qui parcouraient les mers du monde, et qui, au hasard de leur périple, tombaient sur une terra incognita. C’était eux, les vrais aventuriers. Et, toute proportion gardée, notre « exploit »ne pèse pas grand-chose, comparé à ce que pouvait être la vie au quotidien des marins et autres flibustiers. La qualité des prévisions météo, l’électronique embarquée, les balises Argos, la vigilance du Crossmed sont autant d’éléments qui peuvent permettre à quiconque de naviguer avec une relative sécurité. Mais, Dieu merci, tout n’est pas prévisible…
La dernière heure de nav’, avec l’île de Beauté en toile de fond, va se faire au grand galop. Dans une mer hachée, voire à chier, Raphaël va s’arracher les tripes et littéralement nous laisser sur place. Il est comme aimanté par la Corse, et à 10 miles des cotes, à la faveur d’un vent  bien établi au sud ouest, il trace à plus de 25 nds au milieu d’une houle croisée qui secoue franchement le bateau. Les dix mètres de long ne nous empêcheront pas d’enfourner à deux reprises ! Franck est tiraillé par la nécessité de veiller sur nos deux forçats en même temps, alors que près de 4 miles les séparent. On est entre les deux. Du coup, on surveille réellement personne. On se dit alors que le sémaphore qui nous a forcément vus en approche va suivre des jumelles celui que nous délaisserons. On choisit donc de stopper pour attendre Marco. En se rapprochant de nous, ses jambes sont à la limite, et il va tomber trois fois en vingt minutes, signe qu’il est grand temps d’arriver ! L’aile de Raph n’est plus visible, noyée parmi les couleurs surnaturelles des falaises précédant la Citadelle de Calvi. Stephan prend son portable et appelle le club de voile de la ville pour les prévenir de l’arrivée imminente de deux kitesurfeurs partis 5 heures auparavant de St Tropez…. Les autres hallucinent.



Entrée du Port de Calvi - 16h30 : « Je saigne…..moi non plus »

Après avoir récupéré Marco au pied de la dernière falaise avant de basculer dans le port, nous entrons dans la baie de Calvi, à la recherche de Raph. On le retrouvera, sous la forteresse, à bord du petit zodiac rouge du club de voile venu nous accueillir. Après avoir arrêté son chrono à l’endroit prévu, il a voulu aller le plus loin possible, mais les montagnes l’ont bloqué là. On s’approche, il nous regarde arriver sur lui, à faible allure. « J’étais à fond depuis une heure, les gars, mais j’ai pas pu faire mieux que 5h20mn…. » Marco et Raph se tapent dans la main…. Mission accomplie.
Les deux bateaux rentrent bord à bord au ralenti dans le port de Calvi. Une place nous a été réservée. On accoste. Raph débarque. Il boite comme c’est pas permis. Son mollet est bloqué, et la douleur l’empêche d’aller plus loin. Il s’assoit sur le parapet. Marco débarque à son tour. Il sent à son tour une vieille douleur sous le pied droit. Il regarde : La peau de la voute plantaire est partie. Et ça pisse dru le sang. On verra ça plus tard…
Pour le moment, les deux hommes sont assis cote à cote. Ils ont mal partout. Mais ils ont tenu.

Chronique d’une Crossing pas ordinaire

Jeudi 17 Avril 2008
Camargue Crossing
Port St Louis / Beauduc
 Distance parcourue: 25 milles environ


Cela faisait quelques mois qu’on en parlait, comme ça, entre amis et entre deux mousses. Personnellement, ce parcours, je l’avais déjà fait à 6 reprises, en planche ou en kite, seul, à deux, ou à trois. Mais cette fois ci, j’allais emmener avec moi 5 autres glisseurs, 4 kites et une planche, tous novices sur ce parcours,  pour une ballade extra ordinaire de 3 heures dans les vagues camarguaises.
Mercredi 16 Avril : Fraichement rentré du Mondial du vent, je mate sur la toile les sites météo, car malgré la longue distance de Leucate et ses 11 manches courues en 3 jours, j’ai encore envie d’honorer ce petit message qui apparaît à chaque fois que s’allume mon portable : « Plus loin, ce n’est pas assez loin…. »  L’idée originelle étant que je puisse rallier Port St Louis à ….Leucate !!! Mais le vent de Sud Est prévu pour jeudi ne va pas si loin, et s’arrête à Sète. Je décide donc de réviser mes ambitions à la baisse, et, tant qu’à faire, prévoir un trip plus court, mais à plusieurs. J’ai déjà depuis plusieurs mois des candidats en stand by ; Titi et Youenn, nos 2 moniteurs de voile du Centre nautique. Mais depuis la semaine dernière, à l’occasion d’une petite cervoise-party à Leucate, j’ai parlé du trip à mon pot Seb, l’homme à tout faire de chez North, ainsi qu’à Micka, fidèle parmi les fidèles de Carteau, et grand amateur de belles ballades dans les vagues Napoléoniennes…
Ce mercredi là, ils sont tous sur Port St Louis, plus un pot’ de Micka, Coco (windsurfeur aguerri de son état, et qui veut se joindre à nous). Ca tombe bien. J’appelle tout le monde, et leur parle de la prévision météo pour demain jeudi : Vent de Sud Est 20/25 nds, fraichissant 35 nds dans l’après midi. En 10 minutes, le trip est validé : Départ demain devant le Moskito à 11h00 au plus tard. Remontée au près jusqu’à l’embouchure, via la pointe de la Gracieuse, et ensuite grrroooosssssse descente dans les vagues en longeant les 35 kms de plage (cause pas de bateau sécu !!!). On parle taille des ailes, types de planches, sac à dos, boissons, véhicules pour le retour…. Tout est passé en revue. Tout le monde écoute mes conseils avec soins, car bien que carrément jouissif, ce type d’aventure peut tourner au vinaigre au moindre couac, alors encore une fois, plaisir oui, mais humilité d’abord !!! Tous me paraissent enchantés, sauf peut être Seb, mais il a une raison très particulière d’être un poil tendu, il me le dira une fois tous arrivés.

Youenn, Titi, Seb avec sa copine, Momo, et Micka.

Jeudi 17 : 08h00. Afin d’assurer le retour de Beauduc en bagnole, on a prévu Youenn titi et moi de nous retrouver de bonne heure afin de passer le bac et d’aller poser deux caisses et des vêtements secs aux pompes de Beauduc. On prend donc le Bac de 08h50 et à 09h20, on pose les véhicules au début de la plage Nord, puis on rebrousse chemin avec mon fourgon, direction Carteau. Arrivés sur place, Seb, Micka et Coco sont prêts. Ils ont préparé respectivement 7m², 9m², et 5,3m² (planche à voile !!!). Le vent de sud est est déjà présent, 25 nds bien tassés. Pour titi et moi ce sera Bandit 7.5², et youenn partira en 8² tribal 2. Après avoir tout vérifié, je me mets à l’eau à 11h15. Seb et ses sbires m’attendent à l’ile aux mouettes. Je les rejoints, et pendant qu’on monte tranquille et bien servis dans le Pégoulier, on voit les
2 ailes de Titi et Youenn décoller de Carteau Beach. La montée se passe bien. A 11h50, on arrive aux dunes de la Gracieuse. On traverse alors la langue de sable et on décide de poser pour faire un premier point et attendre Titi et Youenn. Une fois ces deux là avec nous, on tchatche un peu de la montée et de ce qui reste à faire.

12h15 : On lève nos ailes, et direction l’embouchure, à 8 kms de là. La mer est assez bordélique, des vagues cassantes nous empêchent de glisser à bonne vitesse. C’est pas grave, on fait pas un run de speed, et puis comme ça, on s’échauffe bien les cuisses !!! Je suis devant, Youenn ferme la marche à environ 1 km de moi. Seul Coco paraît à l’aise et me rattrape sans forcer. Nous arrivons dans cet ordre aux premières vagues de l’embouchure. Ici, c’est chaque fois pareil. Les vagues poussées par un vent opposé au courant du fleuve sont toujours plus hautes et mieux rangées qu’ailleurs. Premiers surfs frontside en direction de la pointe rive gauche de l’embouchure. On « bitche » une nouvelle fois avant la grosse descente. Ok ? Ok !! J’ouvre le bal et au lieu de partir à l’abattée vers la rive droite, je décide de remonter au vent arrière le Rhône sur 300 m afin de traverser la passe dans sa plus faible largeur. Tout le monde suit cette route. Il faut veiller aux troncs d’arbre dérivants, poussés par un fort courant qui génère ça et là quelques vagues cocaïnomanes. Celles ci apparaissent en 1 seconde, tentent de te déstabiliser, et disparaissent aussitôt. La barre est très poissonneuse aujourd’hui, en témoignent les nombreux remous créés par les fuites soudaines des loups de mer à notre approche. Il nous faudra moins de 5 minutes pour traverser cet endroit si particulier qu’est l’embouchure. Au-delà de ce point, on ne peut plus revenir sur nos pas. Et c’est rempli d’un plaisir certain, mêlé à une petite angoisse, qu’on attaque nos premières vagues sur la plage de Piemanson.

Des vagues d’un bon mètre et bien rangées forment un formidable terrain de jeu. On est au vent arrière, et un coup à gauche pour taper la vague et jiber, un coup à droite pour surfer, jiber avec la main gauche dans l’eau et repartir vers les vagues. Ce petit jeu va durer plus de deux heures, avec plus ou moins de réussite pour certains. Au hit parade des râteaux, c’est Youenn qui fait podium, il n’a pas l’habitude de naviguer vent arrière avec son surf strapless 6’9’’ (204cm), et ses passages entre les vagues sont dignes d’un épileptique !!! Titi s’en sort mieux. Il pilote sa Bandit d’une manière plus posée, et contrôle son surf North 5’10’’ avec des trajectoires sympas. Quant à Seb et Micka, ils n’ont pas de problème d’équilibre, car ils sont tous deux en twin tip, ce qui ne les empêche pas de taper vague sur vague. Coco, avec sa « pintchavouale » à de la peine à descendre vent arrière, et ça l’oblige à tirer des bords plus longs en direction du large. A ce jeu il est condamné à faire deux fois plus de bornes que nous. Mais tout se passe comme prévu, chacun, avec ses moyens, profite de la moindre vague pour jouer avec la pente. Pendant des kilomètres, je navigue bâbord amure, et frontside (pied droit devant), faisant ainsi face aux vagues qui déroulent sans faiblir et avec une belle vitesse de croisière. Je pars vers la gauche, en appuyant sur les orteils pour faire cranter mon surf  de 1,90m, je repère ma vague, m’approche d’elle, et pendant que j’envoie ma 7.5² par le bas, je change d’appui, et charge un peu plus l’arrière pour cranter dans le pic de la vague. Ce qui déclenche une belle gerbe et me fait repartir pleine balle dans le trou et en direction de la plage. Petit surf tranquille, puis j’examine sur ma gauche la vague sur laquelle je glisse, et guette un endroit propice pour un jibe court afin de repartir sur elle et remettre les couverts une énième fois…. Pouvoir faire ça pendant des kilomètres, sans avoir à se soucier du retour au près me procure à chaque fois un plaisir rare et intense. Et le fait de partager ces instants magiques avec des pots n’enlève aucune once de bonheur au trip !!!
Nous avons passé depuis longtemps déjà le poste de secours de Piemanson, et laissé depuis peu le phare de Faraman derrière nous. Sur la digue, une petite grue toute rouillée matérialise l’entrée du minuscule port abri du Grau de la Dent. Arrivé à sa hauteur, après une analyse rapide de l’angle du vent par rapport à l’entrée du grau, je décide de rentrer full speed dans l’étroit passage, et me retrouve au beau milieu de ce petit port, avec quelques bateaux amarrés et aucune âme qui vive autour de moi. Etrange moment de repos, alors que « dehors », les paquets font à présent un bon 2 mètres, je navigue dans un espace grand comme un terrain de basket parfaitement plat. Un jibe autour d’un bateau, et je reprends la direction de la sortie, qui sera plus que chaude, à cause d’un passage au ras de gros rochers immergés sous mon vent. Micka est face à moi à 50 m de l’entrée, et me regarde un peu comme un cocker qui comprend pas, vous savez, avec la tête penchée d’un coté… Je le rejoins et on continue plein ouest, au cul des autres.

Les 5 kites sont assez bien groupés, alors que Coco m’inquiète un peu, tant il navigue loin du bord, et assez loin derrière nous. Je ralentis un peu, mais au final décide d’atterrir pour qu’on l’attende. D’autant plus qu’à partir d’ici, il n’y a plus de plage. Les vagues viennent mourir directement contre la digue. C’est donc un secteur sur lequel il nous faudra nous dispenser d’atterrir !!!

Je bitche et les autres kites font de même. Après un quart d’heure d’attente, Coco nous rejoint. Je vais vers lui, et après m’être assuré que tout est OK, je lui dis de rester plus près de nous, car bientôt, à la hauteur du phare de Beauduc que l’on aperçoit déjà, on va arriver à la pointe de la Chèvre, et après, c’est le Golfe de Beauduc. Mais cela veut dire qu’on va progressivement se retrouver dans un système de vent side off puis carrément off shore, donc grosse méfiance, et navigation très près du bord obligatoire. Après cette dernière mise au point, on repart pour le dernier tronçon.

Les 4 kites filent tranquille devant, et je reste avec Coco. C’est ici, en face du phare de Beauduc, que nous allons rencontrer nos plus belles vagues. A 200 m du bord, de beaux spécimens de près de 3 mètres s’offrent à nous, naturellement, comme une récompense à l’arrivée de notre trip. Les descentes sont belles, quoique assez rapides. Ce n’est pas la première fois que je vois de si belles vagues à cet endroit. Je me rappelle notamment d’une crossing avec Marco, ou nous avions surfé ensemble, assez loin du bord, et à 20m l’un de l’autre, une fort belle vague. Elle dépassait peut être les 3 mètres, c’est toujours assez difficile à dire, toujours est il qu’un moment comme celui là ne pèse pas lourd s’il n’est pas partagé….

On tire avec Coco nos derniers bords. Les 4 kites se rapprochent de la pointe comme prévu. Super. Sur le dernier bord en direction de la plage, je lâche Coco et rejoins les autres. Dernières vagues parfaites avec Titi. On arrive sur la zone offshore. Je fais signe à Titi de coller au bord avec les autres. Seb et Micka sont à terre. Youenn arrive à leur niveau. Je me retourne pour chercher la voile de Coco…que je ne vois plus.
Je change d’amure, et repart doucement vers la gauche en scrutant l’horizon…personne. Micka qui comprend ce que je fais, pars à mon vent et m’accompagne. Au bout d’une minute, il me fait signe droit devant. Il a vu quelque chose. Je vois un point noir à la surface. C’est bien Coco. Mais quelque chose ne va pas. On s’approche de lui. Coco nous dit alors : « J’ai cassé mon wishbone ». Et merde !!!! Il n’a pas pied, et bien que je lui ai parlé auparavant de la présence d’un fort courant sur ce secteur, il sous estime complètement la violence de celui-ci. Micka essaie de tracter Coco avec tout son matos, mais ils dérivent trop, et n’arriveront pas ainsi à toucher le sol. Micka dit alors à Coco d’attendre que je le récupère pendant qu’il s’occupera de la planche à voile. Je m’approche alors de Coco, et lui dit de s’agripper à ma jambe arrière. Il m’arrache la jambe. Je décide alors de me foutre à l’eau, barre à main gauche, surf à main droite, et Coco accroché à mon dos. On avance doucement, le problème est qu’on n’avance pas dans la bonne direction. Je suis conscient qu’à partir de ce moment là, notre seule issue pour une fin heureuse, est qu’il va falloir se traverser tout le golfe de Beauduc en nage tractée, depuis la pointe de la Chèvre jusque….quelque part en face, entre le phare de la Gacholle et les Stes Maries de la mer. Je connais bien cet endroit. Mais le vent pousse à 35 nds, la pluie arrive, et on y voit rien à plus d’un kilomètre. Autant d’ingrédients qui ne sont pas fait pour rendre cette expérience agréable. Je pense toutefois que si rien d’autre ne nous arrive, on devrait atterrir vers le phare de la Gacholle, ce qui fait au bas mot 7 à 8 kms de nage tractée au milieu de nulle part, pendus à deux au bout d’une 7.5² bandit. Vu la vitesse à la quelle on avance, je me dis que le bordel va durer un bon moment. Je me contente de prendre une position pas trop fatigante, pendant que Coco s’accroche à mon dos et verrouille mes jambes avec les siennes. Micka nous a rejoints par la droite. Il a abandonné tout le matos de Coco. Il avait peur pour lui. Je lui fais un signe de la main pour qu’il sache qu’on est OK. Micka repart alors au près pour rejoindre les autres, à 500m au vent.

De leur coté, les 3 autres lascars, informés par Micka, rejoignent les voitures sans nous quitter du regard. En pliant leur matos, ils ont un angle de vue sur notre aile qui leur fait penser qu’on prend la direction des Saintes Maries. Après s’être concertés, ils décident d’alerter les secours, car nul ne sait si on va s’en sortir tous seuls. Le portable de Titi n’accroche pas le réseau, et celui de Micka a pris la flotte. Titi décide donc de prendre sa caisse et de filer en direction des Salins de Giraud pour capter le réseau, pendant que les trois autres restent là à surveiller notre dérive. Sage précaution.

On se parle peu avec Coco. Je tâche quand même de le rassurer en ne montrant aucun signe de stress. Je ne m’inquiète pas sur la direction que l’on prend, mais je me dis que si une ligne ou le chicken, ou le harnais, ou la barre pette, ben on va se retrouver dans une sacré merde noire. Donc, pas d’effort sur la barre, je laisse glisser tranquille. Au bout d’une demi heure, cherchant des repères sur ma droite, j’aperçois au lointain le mirador de l’indien. Je dis alors à Coco qu’on a fait environ la moitié. Je le sens trembler. Je lui demande si ça va. Il me répond Ok, il est juste complètement gelé !!! Les vagues de plus en plus grosses nous percutent à droite, signe que nous sommes loin du bord. Chaque vague soulève le surf, ce qui me fait mal à l’épaule. On fait un léger break, et je change le surf de main. Barre à main droite et surf à gauche. Ca va mieux, mais le froid commence à me faire chier. Avec Coco sur mon dos, j’avance avec la bouche au ras de l’eau. Et j’ai en permanence un filet d’eau froide qui me rentre dans la combi par l’encolure, passe sur le sternum, et se diffuse tout le long du corps. Les minutes se suivent les unes aux autres, interminables. Le vent ne mollit pas et la  pluie s’installe. On est dans le grain. Youpi. Je me mets à gamberger : Si une ligne pette, je reste à la barre et Coco récupère l’aile. On s’y accroche, et on se laisse dériver. Primo, on sera plus visibles si les recherches sont mises en œuvre. Deuzio, une aile ça flotte, c’est toujours mieux que de nager. Troizio, poussés par le vent, on arrivera aux Saintes Maries avant la nuit.
Mais bon, de tout ça, on n’en veut pas. On veut que plus rien ne déconne. Si Beauduc est une entité vivante, je me dis qu’il va me reconnaître, qu’il sait que je le fréquente depuis des lustres, que je l’ai jamais fait chier, que j’ai déjà fait en toutes saisons plein de prop’sessions dans ses dunes, que j’ai même écrit un poème sur sa beauté, jadis. Donc Beauduc va forcément faire preuve d’indulgence à notre égard, et tout va bien se passer, voilà !!!
           
Devant moi, au lointain, j’entrevois furtivement une forme sombre au ras de l’eau. Je garde alors mes yeux braqués sur le secteur, et la « chose » réapparaît. Il ne me faut pas longtemps pour deviner que c’est une haute dune plantée sur l’arrière plage, à 300 mètres environ derrière le trait de côte. J’informe Coco que la cote est en vue, mais qu’on en a encore pour un petit moment. Pour autant ni lui ni moi ne hurlons de bonheur. L’ambiance est plutôt plombée, notamment par ce putain de froid. Toutefois au fur et à mesure de notre approche finale, les vagues nous aident à glisser un peu mieux. La plage avec ses zéro mètres d’altitude tarde à apparaître. Je me dis tant mieux, au moins quand on la verra, elle sera toute proche.

Plus que 150 m. Les vagues finissent de nous pousser vers le bord. Inconsciemment, je tire sur la barre pour arriver plus vite. Mais je me calme car on est loin d’avoir pied. Ma poitrine est glacée, j’ai mal au sternum. Ca ne m’était jamais arrivé d’avoir le sternum cryogénisé !! Encore quelques grosses secondes, et on va arriver sur le premier banc de sable… Ca y est !!!! Je gueule « Lâche » à Coco, puis 20 mètres plus loin, je finis à plat ventre dans 30 cm d’eau. J’ai de la peine à me lever. MAIS ON EST SORTI D’AFFAIRE !!! Je demande à Coco de récupérer ma Bandit. Puis je m’approche de lui, on se tape dans la main, il me regarde droit dans les yeux et me lâche un « Merci Momo » qui pèse lourd et me fait oublier pendant 5 secondes qu’on est dans l’antarctique !!!

Le fourgon de Youenn vient d’arriver. Avec Seb et Micka, tous nous rejoignent et prennent en charge mon matos pendant que Coco et moi nous rentrons dans le WW. Seb me regarde et me demande comment ça va. Puis ils nous apprennent que Titi est parti pour déclencher les secours. On décide alors de quitter Beauduc sans tarder et d’appeler les secours pour annuler l’opération. En chemin, on retrouve Titi. Ensemble nous roulons en direction du Bac de Barcarin.

18h00, au Moskito Paradise.

On est là, au comptoir. Seb me tend une bière. Je sais, pour se réchauffer, ya mieux… Micka sort de la douche. Titi délogue sur son PC le GPS qu’il avait embarqué avec lui : 70 kms accomplis !! Pas mal du tout !! Puis Seb trinque avec moi :
         « -   Merci Momo pour cette belle ballade, malgré le bug de la fin, c’était super.
-         Ca m’a fait plaisir de le partager avec vous tous.
-         Je vais te dire une chose, Momo : Il y a quelques temps, quand mon père est mort, ma mère et moi on est venu répandre ses cendres ici, en Camargue… On est passé à Napoléon, Piemanson, Beauduc. Et d’avoir refait ce parcours magique avec toi et les autres, ça m’a fait quelque chose !!! Pour ça aussi, je tiens à te remercier… »






POST SCRIPTUM : REGLES ELEMENTAIRES DE SECURITE



  1. Pour ce type de raid, sans bateau sécu, ne partez pas à moins de trois riders. En cas de problème du premier, le second reste à ses cotés pendant que le troisième déclenche les secours.
  2. Evitez comme la peste le vent offshore. L’idéal pour une downwind, c’est un vent side ou on shore.
  3. Clipsez des œillets plastique à la base du sac à dos pour faciliter l’évacuation de l’eau.
  4. Le sac à dos devra être équipé d’une ceinture abdominale, sinon ça ballotte trop.
  5. Communication sur l’eau : Définissez au préalable un langage de signes simples.
  6. Si plus de trois riders, naviguez en plusieurs groupes pas trop éloignés.
  7. Branchez votre cerveau en mode « ballade » plutôt qu’« arsouille » : Ca évite pas mal de prises de risques inutiles.
  8. Ne la jouez pas tout seul loin des autres, car si vous bâchez, on vous verra plus.
  9. Equipement & précautions d’usage:
ü      Une combi bien chaude (même à la belle saison).
ü      Une étude préalable de la cote, des courants et des points de repli.
ü      Des chaussons, ou vieilles baskets, bien utiles en cas de marche forcée, et un k.way
ü      Petite pompe type « seringue ».
ü      Boissons, barres de céréales, feu à main
ü      Un téléphone dans un sac étanche (préservatif)
ü      1 coupe ligne à portée de main
ü      Prévenir d’autres personnes avant et après le trip.
ü      Annuler si météo douteuse.






jeudi 17 novembre 2011

KITESPEED: Voilà une activité qu'elle est bonne !!!!



Mon histoire avec le kitespeed a commencé avec mon ami Manu BERTIN, que je connaissais depuis 1992. Lui et moi avions croisé nos routes pendant quelques années sur les compétitions de vitesse en planche à voile. On déconnait souvent ensemble, et on naviguait tous les deux avec les mêmes voiles, des Gaastra, qu’il connaissait à la perfection.
 En 1997, j’étais son caddy au Mondial du vent. Il avait obtenu le droit de faire des runs avec son kite au milieu de ses anciens adversaires du windsurf. Je me souviens qu’il avait atteint un peu plus de 26 nds, alors que les planchous déboulaient avec 10 nds de plus. Ouais, bof…. Sur le coup, je me suis dit que pour ce qui est d’aller vite avec un kite, il va falloir se lever bonne heure….Comme quoi !! Néanmoins, toujours grâce à Manu qui me trouve une rare Wipika 6.5m² 2 lignes et me prête une Jimmy Lewis, je me mets au kite, pour rigoler et me mettre des grosses quiches dans pas beaucoup d’eau.
Puis,5 années plus tard, en 2003 donc, un autre Manu, TAUB cette fois, m’envoie la vidéo suivante http://www.youtube.com/watch?v=TiTAKjbN6g4 .
Avec sa position reconnaissable entre toutes (le menton à 30cm au dessus du genou avant !!), on le voit débouler sur le run de Walvis Bay au taquet, et signer un 38.18 nds avant de faire un trou dans l’eau, modèle astéroïde qui ne sait pas freiner. C’est à ce moment là que je me suis dit « Whouoh putttaing !! C’est ça que je veux faire (le run, pas le trou) !!! » Sans tarder, je commande à Marek (le shapeur des Deska) une planche de speed, et un mois plus tard, courant novembre 2003, je signe chez moi à Port St Louis mon premier maximum speed à plus de 38 nds !! Je me dis que c’est bon signe. Y’a plus qu’à s’entraîner tout l’hiver pour être fin prêt le moment venu.

Et ce moment en question, il arrive en Avril 2004. C’est le Mondial du vent. C’est la deuxième année qu’il y a du speed. Parfait. Je m’inscris aux qualifs. On est une bonne trentaine, et ils prennent les cinq meilleurs. Je suis dans le bon wagon, avec entre autres, Olaf MARTING et mon ami Jérôme BILA. Une troisième place aux qualifs me donnera le ticket d’entrée pour l’épreuve reine qui démarre le lendemain.

Mes débuts en kitespeed, avec les boards DESKA ... Merci Marek!!

Les stars du moment sont là : Manu TAUB, Marc GONDARD, Seb CATMAN, etc… Aidé au sol par mon pot Marc BLANC, alias Marco, je tiens pendant les 4 premiers jours la plus haute vitesse. Au final, je suis le seul avec Marc Gondard  à avoir gagné deux manches sur 9, et je finis 4eme au général, avec un run à 38.31nds, ceci avec une vieille takoon hook toute fripée. Jusqu’alors, je payais mes ailes. A partir de là, je rentre chez Takoon et j’ai le matos que je veux !!! Comme on dit : Ca, c’est fait…..

Un mois plus tard, je file avec Marco en direction de Douarnenez, pour le Gd Prix petit navire. Après la cérémonie d’ouverture, et ayant bu plus que de raison, mais moins que Marco, je ne me souviens plus de grand-chose, sauf avoir offert un brin de muguet à Sandrine, et m’être boité bien sévère du haut d’un mur de 2 mètres.
Bilan : Triple fracture de la cheville, façon « pot au feu », et cartilage lyophilisé !
70 jours d’arrêt. Voulant mettre à profit cette longue période d’inactivité, j’en profite pour proposer à Takoon mes services en tant que « responsable » d’un éventuel programme speed. Benoit ORHON me répond alors que Marc Gondard et Manu Taub étant eux aussi chez Takoon, je ne peux prétendre à ce statut. Soit, ce n’est pas grave.

Pendant que je piaffe d’impatience, je surveille le petit monde du kite. Arrive le mois de Juin.  L’état de ma cheville m’interdit de participer à l’épreuve de Fuerteventura prévue pour juillet. Pour autant, tout n’est pas négatif, car une petite info qui me parvient va me redonner de l’espoir. J’apprends en effet que Malik BOUCHENAFA, le rider emblématique de F.ONE quitte la marque basée à Montpellier. Je connais le boss, Raphaël SALLES, depuis les années 90 et l’époque du windsurf. Lui brillait en World Cup, et moi j’essayais tant bien que mal d’avionner en speed au coté des Manu BERTIN,  Olivier AUGE, Anders BRINGDAL, Antoine ALBEAU et autres Chris PRIN GUENON (Tiens, tiens…). Un soir de 1996 ou 1997, nous avions mangé cote à cote avec Raph, au Mondial du vent. Il m’avait parlé des bienfaits du kite naissant. J’avais accroché moyen.
Il m’avait dit « Tu verras, tu y viendras… ». Mais revenons à Juin 2004, donc. Malik parti, je me dis qu’il y a peut être une place de libre au sein du team. Je me décide à envoyer un mail à Raph. Je lui propose mes services, tout en lui disant que ma cheville me pose des vrais problèmes, et que je ne sais pas si je pourrai à nouveau être à 100% dans le run. Il m’accepte sans sourciller, juste parce qu’il est convaincu que je ferai de mon mieux. Aussitôt remis sur pied, je commence à tester des protos de planches et d’ailes de speed. Certaines ailes sont sages, d’autres sont de pures vicieuses. Mais j’apprends à comprendre leur fonctionnement. D’autant qu’à partir de cette époque, je m’entraîne de plus en plus avec un jeune de chez moi qui s’est mis au kite deux ans avant. Alex CAIZERGUES. Il navigue bien, il apprend vite, et surtout, il prend gout à la vitesse. Dans l’hiver 2004, au gré des sessions, on continue lui et moi à s’arsouiller. Rapidement, il me colle aux basques. On s’apporte une aide réciproque. Il me donne un peu de son audace et de sa fougue (J’ai à cette époque 44 ans, lui 24 !!), et moi je lui fais gagner du temps grâce à mon expérience du run, acquise pendant mes 6 années de Coupe du monde de Speed en planche à voile. Très vite il donne des signes positifs, au point que j’en parle à Raph. Je lui dis qu’Alex est rapide, qu’on bosse bien ensemble, et qu’il faudrait l’intégrer dans le team. Raph accepte. Nous voilà donc deux mecs d’un même village bien venté, au sein d’un même team, à avoir les mêmes ambitions : Ca, ça fait avancer les choses, croyez moi !! Arrive Mars 2005. Inscription au Mondial du vent. Je connais bien le gourou de Leucate, Pascal MAKA. Je sais qu’il a quelques Wild cards( en quelque sorte une « invitation à courir») dans sa poche. J’arrive à le convaincre d’en garder une pour Alex, ce qui le dispense de passer par les qualifs, épreuve toujours crainte car un tantinet hasardeuse. Ceci, d’ailleurs, au grand dam de certains riders qui acceptent mal qu’un jeune « inconnu » puisse bénéficier d’une telle faveur. Je les rassure aussitôt: « Ne vous inquiétez pas, il ne devrait pas rester inconnu longtemps… » Arrive Leucate : On court chéplukombien de manches, et au final, je fais 6, et Alex fait 12. Mais j’ai de bons indices à son sujet : Il se prend d’énormes boites et pulvérise 2 planches, preuve qu’il ne rentre pas dans le run en mode promenade !!
La fine fleur de Port St Louis:
De gauche à droite: Cyril PIMONT; Momo; Marc BLANC; Alex TGV CAIZERGUES
Trois mois plus tard, a Fuerte, on s’arsouille pendant 6 jours au milieu du plan d’eau démonté de Fuerte.


Le jour,  le run magique de Sotavento: Savoir faire, Pilotage, et audace.
La nuit, le spot magique de la Carpa: Savoir faire, Pilotage, audace.
http://www.youtube.com/watch?v=AHu37qcwH_k&feature=related

On est équipés à cette époque des F.ONE Mach 5. Alex finit 10 en explosant encore deux planches, et moi je décroche la 5eme place.
Je commence toutefois à accuser le coup des runs à fond et des interminables remontées au près, toilé comme un âne. Ma cheville dans ces conditions me fait souffrir. De retour de Fuerte, je fais le constat suivant : Mon engouement pour la compet n’est plus vraiment là, et Speedy Alex est près pour assurer la relève chez F.one. Aussi je vais voir Raph, et lui dit qu’il est temps pour moi de décrocher du speed. Et là, le Boss me répond : « Attend, momo, j’ai fini de bosser sur un proto d’aile qui devrait te plaire. Je t’explique : Cette aile marche de folie et en plus, tiens toi bien, si tu pousses la barre, ça tire quasiment plus !! C’est ce qu’il vous faut pour le speed !! Le contrôle total et permanent du power !!. Alors voilà ce que tu vas faire : Toi et Alex, vous partez ensemble pour Walvis Bay. Je vous refile 5 ou 6 ailes pour vous deux, vous vous démerdez pour les tailles. Et normalement, avec ça, momo, si tu fais pas podium, il est temps effectivement que tu t’arrêtes !! En plus Walvis Bay, ça va te plaire, c’est assez carré et archi plat, ta cheville devrait pas souffrir du clapot, il y en a pas !!! » Je lui repond « OK, Raph, J’y vais pour essayer d’atteindre mon rêve, les 40 nds, si possible faire podium, et après j’arrête le speed » Quant à Alex, Raph lui dit « Je te paie le séjour, mais si tu veux que je te rembourse aussi le billet d’avion, t’as intérêt à gazer, sinon, c’est niet !! »

On part à Walvis Bay, et ma foi, le Raph avait bigrement raison !! Au final, à l’âge de 46 ans, soit 18 ans après mes premiers runs en planche, je remporte au bout de 8 manches formidables ma première victoire sur une étape de Coupe du Monde !!!!!

Le run magique de Walvis Bay... Véritable accélerateur de particules !!
Photo: Julien TAUB.
 A mes cotés, sur le podium, j’ai Olaf Marting et mon ami Chris Prin Guenon, c'est-à-dire le recordman et le futur champion du monde, ni plus, ni moins !!

Olaf MARTING, Momo, Chris PRIN-GUENON


 De plus, avec un best run à 40.88 nds, j’accomplis mon rêve et devient la 4eme meilleure perf mondiale en kite !!! Alex finit à la 4eme place de l’étape Namibienne, et signe un superbe 41.00nds (3eme meilleur chrono mondial, Derrière Olaf et Catman), ce qui contente largement le Raph qui du coup lui rembourse le billet d’avion…  Elle n’est pas belle, la vie ? Ah, j’oubliais : Avec cette première victoire, bien aidé par les toutes nouvelles TRIBAL, il est évident que je me devais de retarder mon départ en retraite d’une année, afin d’espérer décrocher pourquoi pas (c’était bien parti) le tout nouveau titre de champion du monde de kitespeed.

Dans l’avion qui nous ramène de Walvis, avec Alex, Cyril (PIMONT), Chris (PRIN GUENON) et d’autres, on savoure nos performances respectives, et sachant qu’il reste encore deux étapes (MDV et Fuerte) avant l’attribution du titre, il serait bon d’envisager l’organisation d’une quatrième étape, chez nous, en France, A Port St Louis. Sitôt dit sitôt fait !! En trois mois, on monte la première PKRA kitespeed week de Port St Louis, qui aura lieu juste avant le MDV. L’avantage de cette quatrième étape, c’est qu’elle étoffe un peu le championnat, et aussi qu’avec 4 étapes au total, les riders pourront faire jouer la notion de discards, c'est-à-dire que chaque rider ayant fait tout le circuit sera classé sur la moyenne de  ses trois meilleurs résultats, ce qui lui permet de faire sauter son plus mauvais score. Je ne le sais pas encore, mais cette nouvelle règle me sera au final fort utile…..

Petite anecdote : Un soir, J’appelle Raph pour lui dire tout le bien que je pense de Chris. Or, celui-ci est lassé de naviguer avec les RRD, et il cherche une autre marque. Je connais très bien Chris. Je sais qu’il a un potentiel énorme et une puissance incroyable. Celui qui lui file des ailes sera avec lui sur le podium, c’est évident. Avec Chris chez F One, je vois bien un podium final entièrement F One !!!  Je propose à Raph d’aider Chris. Il n’adhère pas à ma suggestion. Soit…

Avril 2006. On arrive à la veille de l’étape camarguaise. Pour le coup, j’ai double casquette : Organisateur et compétiteur, ce qui n’est pas de tout repos !!!! Se lever à 3 heures du matin pour noter sur un post-it qu’il faut penser a aller chercher 80 baguettes avant 08h00, je vous garantis que ça vous pourrit bien vos nuits !!!! Tout au long de cette étape, je suis sur les genoux, et je limite quand même la casse en finissant 5eme, Alors qu’Alex signe sa première victoire d’étape, chez nous, a Port St Louis !!! Et quand, au soir de la cérémonie de clôture, son maire de père lui a remis le trophée du vainqueur, on a pu lire un belle émotion sur leurs visages !!!

A peine le temps de sécher les combis, que 5 jours plus tard nous voilà à Leucate, pour le 3eme round. Je ne suis pas encore remis de l’étape de Port St Louis. Je suis à 50% de mes moyens, et le speed est une discipline qui exige de donner le maximum, voire un chouia plus !! Je décroche une timide 7eme place pendant que le podium voit monter tout d’abord Chris (PRIN GUENON), suivi de Raph (notre Boss !!!!), et pour finir Alex. Raph, avec une incroyable capacité à lire le plan d’eau et deviner l’arrivée des bonnes rafales, a encore une fois prouvé qu’il pouvait être ultra dangereux, y compris pour ses propres riders.


Podium des lascars....... 1) Chris - 2) Raf - 3) Alex

Podium des ladies..... 1) Aurélia - 2) Charlotte - 3) Fabienne




Petite anecdote : Au fait, je ne vous ai pas dit comment ça fait, dans le run ? Et bien voilà, imaginez un peu : Déjà, le vent : Il te faut un bon 35nds, s’il y a moins, tu fais pétanque. Après, il y a deux types de runs :
Le run archi plat et en général assez carré (100 à 120 degrés du vent), genre Walvis Bay, ou Gruissan plage de droite pour les languedociens, et le run abattu et « choppy »(120 à 145 degrés du vent), genre Fuerteventura ou au large en pleine mer pour tous les autres. Dans le premier cas, la règle, c’est planche plutôt dure, rails très fins, lignes de 20 à 22 m et 7.5². Dans le second cas, il vaut mieux planche un poil souple, rails plus doux, lignes de 22 à 24m, et 10, voire 12m² pour les fans de la Catman Attitude. Après, voilà comment ça se passe :
Tu viens te présenter dans l’entonnoir, 150m avant la porte d’entrée.
Devant toi, y a un gonze à 80m, derrière toi, y a un autre gonze à 80m.

Crantage adonf et bordage velu sont les deux mamelles du kitespeed   (Momo sur le run de Leucate) 


Tu laisses un peu partir le mec de devant, histoire d’avoir ton run assez clair, puis tu te cales bien dans les straps, tu mets un poil plus de patate dans l’aile grâce à ton trim, tu respires un grand coup, et tu accélères en direction du bord de plage. Tu verrouilles bien les genoux, tu bandes tes cuisses et tes mollets, et tu mets toute la gomme. L’oreille inferieure de ton aile descend à environ 5 m de l’eau, et toi tu viens poser ton épaule droite au ras de la plage, et tu regardes loin devant. Tu crantes comme une mule si c’est carré. Jambes fermes mais souples. T’accélères encore, car une des recettes, c’est de passer la porte d’entrée à fond, faire tout le run à fond, et finir…à fond !!


 Ce n’est pas sorcier, c’est juste pas toujours évident !! A 30 nds il faut un peu plus de 30 secondes pour faire les 500 mètres du run. Normalement, vers la moitié, ta cuisse arrière te demande l’asile politique. Mais tu serres les dents, tu fais comme si c’était pas ta cuisse. Tu mates le drapeau de fin du run. Il est là bas, à 150m. Tu veux aller vers lui, mais l’aile veut aller plus bas, vers le large. Les muscles font mal. T’as les fesses au ras de l’eau. Les secondes défilent. A chaque rafale, tu sens l’accélération. Tirer droit, garder le contrôle, et à 50m de la sortie, tu abats, façon psychopathe suicidaire, en direction de la bouée sous le vent. En général, c’est là que tu boites, mais faut pas y penser. De toute façon, quand ça arrive, t’as pas le temps de comprendre ce qui se passe que t’es déjà en train de faire des ricochets en tournant sur toi-même, et t’as qu’à attendre que ça s’arrête tout seul. Après ça, t’as plus qu’à remettre le cerveau en place, cracher les cinq litres de flotte que t’as écopé avec ton pif, et repartir au carton. Attention, ce petit jeu peut durer jusqu’à 6 heures en une journée. Donc un conseil, n’emportes pas tes somnifères, y’en a pas besoin !!!

Juillet 06. Fuerteventura. Dernière étape de ce championnat du monde. Voilà, avant le dernier round, les points des prétendants au podium :

Rider
Nat.
Walvis Bay
Port St Louis
Leucate
Total
CHRIS
Fr
3
2
0.7
5.7
ALEX
Fr
4
0.7
3
7.7
MOMO
Fr
0.7
5
7
12.7
CATMAN
Fr
dernier
8
4
??
Dirk HANEL
All.
5
6
6
17

Chris est le mieux placé, mais Alex est en embuscade. Derrière nos deux avions de chasse, un petit groupe de cinq riders peuvent mathématiquement monter sur la 3eme marche du podium final. Moi, Catman, Dirk, ainsi que Cyril PIMONT et Jerome BILA. Ca va être chaud !! Hélas, je ne pourrai pas m’arsouiller avec eux. En effet, la veille de prendre l’avion pour Fuerte, lors d’un concours de roue arrière en VTT avec mon fils Nicolas, je me mange le trottoir. Et un poignet droit pété, un !! Mais ça, je le saurai que lors de mon premier run canarien… Ce premier run, je le fais en hurlant de douleur, car l’effort de traction sur la barre n’arrange pas mon trait de fracture. Je finis 9eme, « one hand ». Puis le lendemain, je pars à l’hosto pour me faire plâtrer. Je rate la manche deux, et je tente le coup sur la manche 3, mais le plâtre n’a pas atténué la douleur. Je décide alors de renoncer à la suite de la compétition. Ma possible 3eme place au podium final ne dépendra plus de mes performances, mais plutôt des contre performances éventuelles de mes adversaires directs. Devant nous, la lutte entre Alex et Chris tourne à l’avantage du puissant varois. Je finis troisième, car le jeu des discards jouera en ma faveur, alors que sans cette loi, c’est à mon ami Dirk HANEL que revenait logiquement cette place.

http://www.youtube.com/watch?NR=1&v=I5hKZpZdo-Q


Rider
Nat.
Walvis Bay
Port St Louis
Leucate
Fuerte
S/Total
Discard
Total année
CHRIS
Fr
3
2
0.7
0.7
6.4
-3
3.4
ALEX
Fr
4
0.7
3
2
9.7
-4
5.7
MOMO
Fr
0.7
5
7
19
31.7
-19
12.7
CATMAN
Fr
24
8
4
3
39
-24
15
Dirk HANEL
All.
5
6
6
5
22
-6
16


Le podium de la saison 2005/2006: 100 % Frenchies !!! Y'a rien, là ????

Petite anecdote : L’avant dernier jour de Fuerte, étant cloué à terre avec mon poignet cassé, je demande à mon fils Nico qui m’accompagnait si par hasard, ça l’intéresserait de courir. Il me fait ses grands yeux écarquillés, et me dit qu’il voudrait bien, mais il n’est pas inscrit, il ne voit pas comment…. Je lui propose de mettre mon lycra de course, et avec la bienveillance de l’équipe de chronométrage, peut être que la direction de course laissera faire. Il n’y croit pas. Je vais voir Manu DUBY qui bosse au timing, elle me répond « Dis rien, Momo, et on verra bien si ça passe… » La manche d’après, mon fiston s’équipe, met mon lycra qui, certes, flottait ardemment, me tape dans la main, et part avec les autres riders au courant de la « mystification ». C’est ainsi que du haut de ses 15ans et demi, le jeune Nicolas MAURIN, avec le numéro fétiche de son père (30)a fait ses premiers runs, en finale de la première Coupe du Monde de vitesse de kite, en signant même une brillante 17eme place à la manche 10 !! Y’a pire comme débuts, non ?


Photos du haut; de gauche à droite: Jérôme BILA - Chris PRIN GUËNON - Alex CAIZERGUES - CATMAN - Henry PRIEUR - Dirk HANEL - Fabulous Fab D'ORTOLLI - MOMO - Olaf MARTING - Erik "Kasimir" CARRIERE - Aurélia HERPIN - Manu TAUB - CHEPLUKI - CHEPLUKINONPLU - Charlotte CONSORTI - José ALARCON - Cyril "Kellog's" PIMONT.